Ça y est, cette année, vous êtes en thèse ! Dès les premières semaines, un flot d’interrogations surgit, sur la nature du travail, sur son organisation, sur les sources à consulter, sur les relations avec le directeur… Je fais ici un point sur les questions qui me sont le plus souvent adressées.

J’ai l’impression de ne rien faire, qu’est-ce qui se passe ?

Voilà une « impression » très répandue chez le doctorant débutant. Vous vous activez du matin au soir, vous lisez, réfléchissez, et il n’en sort rien de concret. Pourquoi ?

On peut identifier deux facettes de ce problème : la dispersion, et l’absence de résultat tangible dans votre travail.

Faire une thèse implique beaucoup de tâches différentes et connectées entre elles : recherches bibliographiques, lecture, observations de terrain, réflexion, tri des informations, écriture…  Ces tâches doivent se combiner : si vous ne faites que lire par exemple, sans rien d’autre, vous vous égarerez et ne produirez rien. Mais quand on s’aperçoit qu’il faut avancer sur plusieurs fronts, on tombe dans un autre écueil : faire un peu de tout sans rien terminer.

Le remède se trouve dans la pratique régulière de la synthèse. Vous avez lu quelques ouvrages, vous vous avez commencé à vous renseigner sur votre terrain (ou à prendre connaissance de votre corpus), vous avez noté des réflexions personnelles, des questions… Arrêtez-vous et faites un point d’étape. Rédigez une synthèse d’une ou deux pages. Cela va vous forcer à rassembler vos idées, à les concentrer, à faire émerger des questionnements centraux. Faites-le régulièrement, tous les deux mois par exemple. Après avoir rédigé cette synthèse, demandez-vous ensuite quels points vous devez vérifier, quelles notions restent obscures : c’est dans cette direction que vous poursuivrez vos investigations.

Ecrire un point de synthèse vous permet de produire un résultat intermédiaire, quelque chose de concret. Vous vous sentirez satisfait(e) d’être allé(e) au bout d’un petit texte, et donc vous serez plus motivé(e). Il est utile de s’y astreindre en début de thèse, mais aussi quand le travail est plus avancé ; je développe aussi ce conseil dans cette vidéo. Attention, la synthèse ne doit pas vous paralyser pendant des semaines. Deux ou trois jours suffisent à la produire, d’autant plus qu’elle est à usage personnel et peut donc être imparfaite.

Je ne sais pas par où commencer

Une variante de cette difficulté est : je n’arrive pas à faire ce que mon directeur estime être la première tâche d’un doctorant (en général, un état de l’art ou un cadre théorique, ou encore un chapitre contextuel).

Il faut comprendre que l’incertitude est un état normal en début de thèse. Vous avancez à tâtons dans une forêt inconnue, il n’y a pas de grand-route. A vous de prendre une machette et de tailler un chemin : et le « bon chemin » est celui que vous serez parvenu à créer : il doit être praticable, bien balisé pour les visiteurs.

tracez votre propre chemin, progressivement !

Vous vous épuisez en vain à essayer de trouver un chemin déjà tracé. En réalité, vous êtes en phase d’exploration. Vous découvrez des pistes à creuser, des possibilités. Vous ne pouvez pas encore produire un document réglant définitivement telle ou telle question. Un état de l’art ou un cadre théorique en début de thèse sera nécessairement un premier jet, destiné à évoluer considérablement. A trop vouloir le perfectionner, vous perdez un temps fou, car il vous manque des éléments à ce stade. Je rejoins ici les conseils de James Hayton, qui souligne la nécessité de se fixer des objectifs moins ambitieux en début de thèse, pour prendre en compte le fait que vous en êtes au début d’un apprentissage, et de les augmenter peu à peu.

Organisez votre exploration : vous êtes dans un moment où vous devez rester ouvert(e) et créatif (ve), acceptez de découvrir, de questionner sans cesse. Posez quelques questions de départ, puis des hypothèses à vérifier (tentatives de réponse à la question). En cherchant à les vérifier, vous devrez lire, réfléchir, enquêter. Vous accumulerez un savoir et vous vous ferez peu à peu une opinion argumentée sur votre sujet.

Je suis complètement perdu (e) dans mes lectures, je ne sais plus quoi chercher

Je rencontre beaucoup de doctorants qui lisent trop : c’est-à-dire bien plus que ce qu’ils peuvent réellement digérer. J’ai écrit il y a quelques temps un article à ce sujet : je vous invite à le relire si vous êtes noyé (e) sous les références bibliographiques !

Ne vous enfermez pas dans vos lectures !

J’oublie au fur et à mesure, je ne peux pas traiter toutes ces infos

Si vous pensez cela, c’est qu’il est temps de mettre en place une méthode de classement. Que devez-vous classer ? Les extraits d’ouvrages qui vous intéressent, vos observations de terrain (ou extraits de corpus) et vos idées personnelles. Prenez un moment pour y réfléchir et choisir une méthode. Pour classer la bibliographie, le logiciel Zotero peut être utile. Vous pouvez aussi utiliser de bons classeurs, avec des intercalaires selon les thématiques de votre thèse. Quoiqu’il en soit, dès maintenant et sans plus attendre, commencez à trier et classer.

Je panique devant l’ampleur de la tâche

Imaginez que vous devez gravir une montagne. Si vous n’avez pas prévu d’étapes intermédiaires, et que vous y allez la fleur au fusil, cela risque de mal finir.

Penser par étapes est fondamental. Il faut connaître les grandes étapes de la thèse ; si vous ne les connaissez pas, pensez à vous former !

Penser par étapes signifie aussi savoir poser de petits objectifs mensuels, hebdomadaires, et même quotidiens. Organisez-vous avec un agenda, ou un bullet journal.

Quand est-ce que je dois écrire à mon directeur ?

Même les doctorants en fin de thèse peuvent se poser cette question. Mais vous qui débutez, vous pouvez d’ores et déjà vous enlever cette épine du pied :  allez voir votre directeur et demandez-lui franchement comment se passera la collaboration. A quel intervalle auront lieu les rendez-vous ? Pouvez-vous lui écrire régulièrement ou préfère-t-il que le point soit fait globalement en rendez-vous ? Essayez d’exprimer vos besoins. Bref, mettez-vous d’accord, avec souplesse et courtoisie.

Faites part de vos questions et commentaires ci-bas ! Cela aide les autres doctorants à se sentir moins seuls !